Ruth Mead est une pétillante et délicieuse
américaine qui a écrit l’an dernier un livre étonnant « Speech is a river,
my recovery from stuttering» (la parole est un fleuve, ma guérison du
bégaiement) où elle raconte comment son bégaiement a disparu.
Ce livre est étonnant parce qu’il va à l’encontre
des thérapies de « modification du bégaiement » ou de
« façonnage de la fluence » qui encouragent à "travailler" sa parole. Pour se libérer de 30 ans de bégaiement,
Ruth a en effet mis en place le procédé inverse en partant de 3 observations,
que la plupart d’entre nous ont d’ailleurs sans doute déjà faites :
1) Les personnes qui ne bégaient pas ne pensent pas
à leur parole et ne cherchent pas à la contrôler. Elles ouvrent la bouche et
laissent le flot couler sans prêter attention à la manière dont elles vont
former leurs mots.
2) Lorsque Ruth était seule ou dans certaines
autres situations, elle était capable de connaître cette fluidité naturelle.
Elle était donc capable de parler « normalement ».
3) Plus elle essayait de contrôler sa parole, plus
elle bégayait.
A partir de ces 3 observations, Ruth est arrivée à
la conclusion que la parole coulait en
toute autonomie, comme une rivière ou un fleuve (Speech is a river), et qu’il était vain et contre-productif de vouloir
« pousser » l’eau pour qu’elle coule. L’eau coule, un point c’est
tout !
Elle a donc décidé de faire confiance à sa capacité
naturelle d’élocution et de ne plus laisser sa pensée consciente prendre les
commandes. Elle a cessé d’anticiper et de réfléchir à la manière dont elle
allait sortir ses mots. Et une chose pas si étonnante que cela s’est
produite : sa rivière s’est remise progressivement à couler, sans
rencontrer de résistance… Comme le dit RUTH : « Je n’ai pas travaillé
pour arrêter de bégayer. J’ai travaillé pour déblayer le canal afin que ma parole puisse couler facilement. »
C’est à la fois très simple et difficile à
expliquer. C’est pourquoi vous devez lire, si vous parlez anglais,
« Speech is a river ». Vous comprendrez mieux le parcours de Ruth et
comment elle a réussi à « retrouver » sa fluence.
Par chance, Ruth fait aussi le bonheur du forum
américain « neurosemantics » qu’elle illumine de ses interventions et
contributions à la fois drôles et utiles. C’est là que j’ai fait sa
connaissance et que j’ai pu voir à quel point son témoignage rencontrait un
écho positif chez les personnes qui bégaient. L’orthophoniste américaine
Barbara Dahm, spécialisée en bégaiement et membre fondatrice de l’International
Fluency Association, lui a aussi consacré un article enthousiaste.
Voici ce qu’elle dit :
« Elle a
tout compris, tout compris ! » C’est ce que je ne cessais de
m’exclamer tout au long de la lecture de « Speech is a river ». C’est
vraiment le seul livre que je connaisse qui aborde en
profondeur la fâcheuse tendance des personnes qui bégaient à anticiper,
examiner, réfléchir à leurs mots avant de parler. C’est un livre que devraient
lire toutes les personnes qui bégaient, ainsi que leurs amis et leur
famille ! »
Bien sûr, certains resteront étanches à cette théorie/thérapie et Ruth ne prétend pas avoir trouvé la recette universelle pour guérir du bégaiement. Voici d'ailleurs ce qu'elle dit en préambule de son livre : "J’ai décidé de raconter simplement ce qui m’était arrivé, la progression des évènements et mon interprétation, aussi clairement et sincèrement que possible et de vous laisser ensuite assembler les pièces pour parvenir à vos propres conclusions. Si mes observations ne confirment pas les vôtres, faites plutôt confiance à vos yeux !"
Pour ma part, je partage l’enthousiasme de Barbara et je pars du principe que ce n'est pas parce que ça n'aidera pas tout le monde qu'il ne faut en parler à personne ! Cela
faisait donc quelque temps que je voulais vous parler de Ruth. Or, il se trouve qu’elle
vient de rédiger un article pour la lettre de l’Indian Stammering Association
où elle résume parfaitement son histoire. Elle a trouvé une très jolie
métaphore pour vous raconter sa transformation et c’est donc avec grand plaisir
que je vous donne aujourd’hui, avec son accord, la traduction de cet article.
Début de la traduction
Si votre Rossignol ne chante pas
par Ruth Mead
Jusqu’à 33 ans, j’avais un gros
problème de bégaiement. Et ce n’était pas l’un de ces « charmants petits
bégaiements » : je bégayais violemment. Durant toutes ces années, je
n’ai retenu qu’une chose de mes thérapies : « Si vous travaillez
suffisamment dur pour apprendre à contrôler votre parole, vous pourrez
progresser. »
Contrôler ma parole signifiait
préparer la manière dont j’allais dire les mots, quand et avec quelle intensité
respirer, remplacer des mots par d’autres et parler au rythme d’un métronome. J’étais
devenue tellement experte dans ces procédés de contrôle que je pouvais même les
accomplir durant mon sommeil.
Je n’étais pas capable de remettre
en cause cette vision des choses parce que mon propre raisonnement était une
régurgitation de ce qu’on m’avait appris. Je corrigeais mes paroles constamment
et croyais que « ma pensée consciente contrôlait ma parole ». Et la
version la plus angoissante de cette théorie était la suivante : « si
je ne travaille pas suffisamment dur sur différents moyens de contrôle, je vais
subir la catastrophe ultime : être incapable de sortir un mot. »
Je payais cher le fait d’écouter
la voix de l’autorité plutôt que de me fier à mes propres observations, l’une
d’entre elles étant que les personnes qui bégayaient étaient les seules, à ma
connaissance, qui pensaient constamment aux mécanismes de la parole. Cela m’amenait
à conclure que les bègues insèrent un élément conscient dans leur parole qui entre
en résistance avec le flot naturel des mots.
Comme la plupart des gens qui
bégaient, mon bégaiement était situationnel. Lorsque je lisais seule à voix
haute (et que personne ne pouvait m’entendre), je pouvais parler parfaitement :
le flot était là. Pourtant, aussitôt qu’un adulte entrait dans la pièce, le
flot s’interrompait et je me mettais à penser à chaque mot que j’allais dire et
comment j’allais le dire. Le bégaiement ressemblait à une anxiété de performance : plus je
voulais bien faire, plus je bégayais et plus j’essayais de contrôler ma
performance, plus je coinçais.
Je savais vaguement qu’il y avait
deux systèmes dans le cerveau et qu’il y a sans cesse des conflits entre eux.
Il y a d’un côté « l’expérimentation » intuitive (Système 1) : c’est
le cerveau subliminal, spontané et automatique, qui prend en charge sans y
penser et sans effort des tâches telles que parler ou respirer. Le second
système est celui de la « mémoire » théorique qui exerce un contrôle
conscient sur le monde qui l’entoure et nuit aux intérêts du Système 1, naturel
et spontané. (Lire à ce sujet « THINKING FAST AND FLOW » de Daniel
Kahneman. Note de Traduction : en gros le système 1 est celui utilisé quand
nous faisons les choses automatiquement, sans y penser et le Système 2 celui où
intervient la pensée conscience. Voir sur ce lien en français une présentationdes travaux de Daniel Kahneman.)
La parole est un flot et le timing
entre ces deux systèmes est si crucial pour la fluence que la moindre tentative
pour contrôler mon bégaiement était une résistance suffisante pour interrompre
ce flot. Quand la résistance était levée, le flot se déversait.
Cette croyance que je devais
contrôler les mécanismes de ma parole semblait actionner la part consciente de
mon cerveau (Système 2) en lui envoyant le signal de faire une chose qu’il
n’était pas censé faire : agir sur la production de parole. Nous savons
que le cerveau automatise la parole, libérant ainsi la pensée de contrôler ce que nous disons. Quand les signaux moteurs arrivent au système
moteur sans interférence de la conscience, la parole devient automatique.
Or, quand j’essayais de contrôler
ma parole, je perdais cet automatisme.
Mon bégaiement a disparu bien
avant que je sache exactement pourquoi, même si j’avais écrit des pages et des
pages d’observations durant la période où mon bégaiement était en train de disparaître.
Plus tard, quand j’ai lu le livre de John Harrison « Redéfinir lebégaiement », je m’y suis totalement retrouvée. Harrison confirmait mes
propres découvertes : en général, la pensée consciente, à cause de son
incapacité à penser à plus d’1, 2 ou maximum 3 choses à la fois, est clairement
incapable d’accomplir l’incroyable processus multi-tâches que nécessite la
prodigieuse complexité de la parole. Et attendre de la pensée consciente
qu’elle fasse ce qu’elle n’a aucune aptitude à faire peut, et c’est fréquemment
le cas, déclencher un état de panique.
« Ironiquement, le blocage vient
d’un excès de contrôle. » écrit Harrison. Et Barbara Dahm, une
orthophoniste israélienne, abonde dans ce sens : « Je suis en
désaccord avec mes collègues qui prétendent que le bégaiement vient d’un manque
de contrôle. Ils disent que les mouvements de tête, les grimaces, les
répétitions et les blocages du larynx sont signes d’une perte de contrôle mais
c’est une illusion. Le fait est que parler est un automatisme dans le cerveau.
Les neurologistes le disent, les experts psycho-linguistiques le disent. Le
temps est venu de le dire aux personnes qui bégaient. »
Alors que je voyais que la
guérison ne pourrait venir qu’en permettant à la parole de fonctionner
spontanément et automatiquement, j’étais toujours incapable de me débarrasser
de mes anciens schémas. Essayer de parler naturellement, c’est toujours essayer
et essayer est une forme majeure de contrôle. C’était comme si je disais :
« Je ne vais pas laisser ma pensée consciente contrôler ma parole donc je
vais faire de gros efforts pour ne pas faire d’efforts. » Je ne pouvais
pas m’en sortir d’autant que je portais en moi des années d’angoisse de rester
« bloquée » sur un bégaiement. Cette incapacité à avancer était vraiment
pénible.
Quand j’avais trop peur de perdre
les acquis durement gagnés « au rayon de la spontanéité », j’étais
tentée de revenir au système 2, celui de la conscience, et je gémissais :
« cette manière de parler sans contrôle est décidément trop difficile et
effrayante ! Mes vieux mécanismes de contrôle me manquent ! »
Un jour, j’ai cherché à savoir ce
qui me poussait à abandonner le contrôle. En fait, j’essayais de ne plus contrôler ma parole afin de pouvoir arrêter de bégayer. En fait, cela signifiait que je
n’abandonnais pas du tout le contrôle ! J’essayais simplement de ne pas bégayer.
Mon amie, Sophie Sacca, a dit :
« Je sais que je dois abandonner tout contrôle sur ma parole pour obtenir
la fluence mais si ma motivation est de parler de manière fluide alors je me
retrouve de nouveau à essayer de prendre le contrôle de ma parole. »
Le bégaiement faisait toujours
partie de la voix que j’avais en mémoire et il est difficile de lutter contre
sa mémoire. Finalement, j’ai été capable d’arrêter de contrôler ma parole parce
que j’ai vu la parole automatique comme un cadeau de la nature, pas comme
quelque chose que je pouvais gagner ou obtenir en travaillant. Je pouvais
prendre ce cadeau et dire « merci » ou bien continuer à travailler,
en essayant de fabriquer quelque chose qui était déjà « là ».
J’ai aussi réalisé que la plupart
des problèmes surviennent de cet excès de contrôle. Notre second système (la
pensée consciente) s’accroche à l’illusion que tout doit être sous contrôle et perturbe
ainsi notre performance en sport, dans le domaine de la parole ou même au
piano.
LA METAPHORE
Les Métaphores puissantes rendent
visible l’invisible (par exemple en représentant l’électricité comme de l’eau
circulant dans un tuyau). Et c’est une métaphore qui m’a aidée à voir ce qui se
passait durant mes blocages à la fois oraux et écrits.
L’inconscient, comme on le sait,
utilise la langue des symboles et de la métaphore. Tout comme « La parole
est un fleuve » a travaillé en sous-marin pour finalement torpiller
l’illusion que je devais fabriquer chaque mot que je prononçais et chaque
respiration que je prenais, la métaphore du rossignol a dissous l’illusion que
ma pensée était capable de contrôler les mécanismes de la parole.
Cette nouvelle métaphore est
venue d’une ritournelle qui ne me quittait pas : une stupide chanson d’amour
que j’avais jouée au violon pour mes enfants. Vous la connaissez
probablement :
« Chut ! Petit bébé, ne
dis rien…
Maman va t’acheter un rossignol.
Et si ce rossignol ne chante pas,
Maman t’achètera une bague en
diamant. »
Finalement, j’ai
écrit « Si ton rossignol ne chante pas » dans mon carnet et j’ai
attendu de voir si cela m’inspirait autre chose.
Quelques minutes plus tard :
« C’est un rossignol, pas n’importe quel rossignol mais celui que je crois
être le mien… Et apparemment, il ne veut pas chanter. » De plus, mon
problème de bégaiement peut induire plus de choses que mon impossibilité à
parler avec fluence. Il peut aussi impliquer une relation entre mon rossignol
(mon esprit créatif, le système 1) et
moi (mes pensées de contrôle… Le système 2… Qui découvre que son rossignol ne
chante pas et s’improvise entraîneur d’oiseau dont le boulot est de faire
chanter son rossignol.)
C’était comme si je n’avais pas
compris que les oiseaux chantent des chansons d’oiseaux tout simplement parce
qu’ils sont des oiseaux et non parce qu’on leur a appris à chanter ou qu’ils
ont choisi de chanter. Je me suis donc bombardé « Entraîneur
d’Oiseau » comme si mon rossignol ne savait pas comment chanter. Je lui
donnais des ordres : « Sois performant ! Chante ! J’exige que
tu chantes ! » et je pensais ensuite fièrement : « Voilà !
Maintenant mon rossignol va chanter ! »
Mais mon rossignol me regardait
d’un air ahuri. Alors je devins de plus en plus exigente, jusqu’à l’excès :
« Ecoute, mon pote, tu me dois une ou deux chansons. Qu’est-ce qui ne va
pas avec toi ? Tu as un caillou dans le gosier ou quoi ? »
Et je passais alors aux
menaces : « Ecoute, je sais que tu peux chanter si tu le veux. Alors,
écoute bien… Tu ferais mieux de te mettre à chanter si tu sais ce qui est dans
ton intérêt. »
Mais mon rossignol ne chantait
toujours pas.
Cela commençait franchement à
m’agacer. Cet oiseau ne m’aura pas, me disais-je. Il est possible que je ne puisse
pas apprendre à mon rossignol à chanter mais un spécialiste le pourra sûrement !
J’ai donc amené mon rossignol au
spécialiste le plus expérimenté que j’ai pu trouver. Je suis rentrée seule chez
moi, vraiment soulagée. Ce spécialiste ne me prendrait pas trop d’argent s’il
ne savait pas comment apprendre à mon oiseau à chanter, n’est-ce pas ?
Bien sûr que non ! J’étais heureuse et soulagée.
Quelques jours plus tard, le
spécialiste m’a appelée : « Votre oiseau est guéri ! Je
l’ai laissé seul dans une pièce et il a chanté merveilleusement. » « Waouh ! » me suis-je
exclamée. « C’est super ! J’arrive. »
Le spécialiste avait préparé un
diplôme à encadrer pour mon rossignol, attestant sa guérison.
Cela méritait une petite
cérémonie. J’ai cuisiné un dîner spécial pour ma famille et allumé des bougies.
J’ai noué un grand ruban jaune sur la cage et je l’ai posée à table pour
nourrir mon oiseau avec ses fruits et noix favorites.
A présent, le dîner est terminé.
Le moment magique est arrivé. Nous attendons impatiemment le tour de chant du
rossignol… Oh ! Non ! Ca ne va pas recommencer ! Nous le
supplions : « S’il te plaît, nous attendons. Nous voulons t’entendre
chanter. »
Mon enfant, déçu et triste, suggère :
« Pauvre oiseau sauvage, il a peur.» J’approuve : « C’est
ça ! C’est ça le problème ! Mon oiseau a peur de chanter. Pourquoi
n’y ai-je pas pensé avant ? Cet oiseau a besoin d’un thérapeute pour
l’aider à affronter son anxiété de performance. »
J’ai emmené mon oiseau chez un
thérapeute. Après m’avoir écoutée, elle a secoué la tête tristement. Elle ne pouvait
pas aider mon rossignol. « Les rossignols n’ont pas peur, » m’a-t-elle
expliqué. « Je ne peux donc pas soigner les peurs de votre
rossignol. »
« Alors qu’est-ce qui
cloche ? » ai-je gémi.
« Libérez votre
oiseau », m’a-t-elle conseillé. « Il a sa propre chanson mais les rossignols en cage ne
chantent pas. »
Nous sommes rentrés à la maison,
mon rossignol et moi. J’étais en colère contre la Thérapeute. Elle ne savait
pas combien mon oiseau avait besoin de moi. Que ferait mon rossignol sans
moi ? J’étais désespérée.
Arrivée chez moi, je me suis assise
à côté de la cage, la tête dans les mains. Toute la journée, j’ai pensé à mon
oiseau qui ne pouvait pas me chanter de chansons. En dépit de tous mes efforts,
je n’arrivais pas à faire chanter mon rossignol.
Il n’y avait plus qu’une chose à
faire.
J’ai transporté la cage dans le doux soir d’été et je l'ai ouverte. J’ai pleuré quand mon rossignol s’est envolé
vers la liberté. Je l’ai regardé s’élever dans le ciel. L’obscurité est tombée
et la lune est apparue. De gros nuages l’ont masquée un moment.
A présent, je frissonne, inquiète
pour mon rossignol seul dans le noir. J’ai regagné la maison et je me tiens devant la porte ouverte…
Attendez ! Qu’est-ce que
j’entends ? Je plonge dans l’air de la nuit, en courant sur la pointe des
pieds. Très haut au dessus de moi, sur la plus grande branche du sycomore, je
vois la silhouette d’un oiseau et ses ailes sont entaillées d’une lumière
blanche. Quand la lune perce complètement les nuages, j’entends la mélodie
d’une chanson d’amour : c’est la complainte émouvante de mon rossignol, sa douce chanson.
Fin de la traduction.
Si cette métaphore et les mots de
Ruth vous parlent, je vous invite à télécharger son livre ici (en anglais). Je pense que j'y reviendrai dans un prochain article.
En attendant, je ne vous souhaite qu'une chose : que votre rossignol laisse bientôt entendre sa jolie voix…
En attendant, je ne vous souhaite qu'une chose : que votre rossignol laisse bientôt entendre sa jolie voix…
Laurent
18 commentaires:
C'est marrant, je viens justement de commencer à feuilleter son livre !! En fait, je viens tout juste de m'inscrire sur le groupe Yahoo ;)
Je m'étais déjà rendu compte également qu'en arrêtant de penser à ma parole, et surtout à mes blocages, et en me concentrant sur le contenu de mon message plutôt que sur le contenant, la parole se faisait plus fluide.
Merci à toi de nous la faire découvrir !
"....je vais faire de gros efforts pour ne pas faire d'efforts", cette phrase dans ton article Laurent m'a énormément marqué car c'est exactement ça la clé de la fluidité de la parole.
Quand je dois parler à quelqu'un et que je sais que je vais bégayer, j'en ai tellement marre de vouloir toujours me contrôler que ça m'énerve et je me dis: "tant pis si tu bégayes, parles on verra bien". Au final, je ne bégayes pas un instant. Comme quoi...ça reprend aussi la fameuse vidéo avec Bérenger quand tu disais qu'au bout de la 50ème fois tu t'habituais à dire la meme chose en bégayant alors une fois de plus ou de moins c'était pareil...ça m'a fait penser à ça.
Merci pour cet très bon article!
Ne pas hésiter à parler de quelque chose qui peut aider ne serait-ce qu'une personne, ça coule de source qui finit en fleuve ;) C'est un beau témoignage. Merci Laurent. Il n'en demeure pas moins que contrôler peut amener à la fluidité. L'apprentissage de techniques motrices d'aide à la fluence est une forme de contrôle, saine. Mais ce n'est pas pour ça qu'un bégaiement se caractérise ou provient d'un manque de contrôle ou au contraire d'un contrôle excessif. A la base il y a un bégaiement sur lequel se greffe le contrôle.
Très intéressant . C'est ce que j'essaye aussi de faire avec le chant... Libérer la parole, retrouver du plaisir et faire le lien avec la voix parlée ! Gustave va vous en parler justement !
Merci Laurent pour cette coulée pleine de lâcher-prise.
P.S. : J'ai une idée de post sur un sujet sur lequel j'ai du mal à trouver de la littérature : le plaisir de parler, fluent ou pas
Merci à tous pour vos commemtaires, ça me fait vraiment plaisir de voir que le temoignage de Ruth entre en résonnance avec vos experiences.
@Bérenger : les frenchies sont appréciés sur le forum yahoo et tu verras que les échanges sont vraiment riches et constructifs.
@Sylvie : je savais que ça plairait à Gustave :-)
@Sarah : la 50eme fois, l'apprehension s'est en général envolée et le bégaiement aussi ou a fortement diminué. D'où l'interêt de s'exposer encore et encore pour se désensibiliser.
@Cédric : mais est-ce que les techniques de fluence ne finissent pas aussi par s'automatiser et se faire sans y penser?
@Olivier : rechercher le plaisir plutôt que la performance, voilà une des choses que j'ai comprises. C,est une super idée d"article, je vois si je te trouve des sources. Il y a eu des echanges sur le forum neurosemantics sur le thème "having fun", je vais fouiller...
C'est vrai. Les techniques peuvent devenir des automatismes. C'est en ça que je disais que le contrôle amène à la fluidité. Car pour cela, il faut passer par une phase de contrôle et d'entrainement plus ou moins longue selon les personnes, mais pas par ce qu'a vécu Ruth. Substitution et métronome : qui oserait encore préconiser ça parmi ceux qui connaissent bien les bégaiements ?
Merci pour cet article, très intéressant.
Cela me rappelle les thérapies d'acceptation et de pleine conscience, et cela m'évoque une phrase que j'ai parfois entendue : "j'ai oublié de bégayer!" :-)
"J'ai oublié de bégayer" : voilà une phrase que j'ai lue pour la première fois en 1996 dans un témoignage sur la Stuttering Homepage. Ca m'a toujours paru farfelu... Jusqu'à il y a 2 ans environ où je me suis rendu que ça m'arrivait parfois aussi. Mais je suis bien incapable de décrire ce processus.
"J'ai oublié de bégayer" est en effet une bien jolie phrase et peut-être une clef. Je sais aussi que parfois, quand je suis vraiment crevé, "je n'ai plus la force de bégayer". Quant au processus, c'est ce qui est en effet le plus difficile. Comment réussir à ne pas penser à quelque chose, à être dans l'oubli volontaire ? Ruth explique dans son livre que l'écriture automatique l'a beaucoup aidé à apprendre à laisser aller sa pensée, à ne pas laisser son esprit de "censure" se manifester. C'est une piste que je vais creuser... Laurent
C'est très étrange, lors de mes premiers grands accès de fluidité :), j'ai justement ressenti une impression de fleuve s'écoulant sans retenue ...
Alors cette métaphore et toutes les idées exprimées (le plaisir, la spontanéité, le non-contrôle, l'oubli de bégayer rencontrent un très fort écho chez moi.
Tout comme la difficulté après coup à dire quels ont été le ou les éléments majeurs, ceux qui ont fait basculer de la parole bégayée (controlée) à la parole fluide (libre comme le Rossignol)
Daniel P.
Excellent post, Laurent:
L'EFFORT EST CONTRE-PRODUCTIF !
S'il y a au moins une chose pour laquelle je peux remercier mon bégaiement, c'est de m'avoir appris ça, l'effort est contre-productif, et ce dans tous les domaines de la vie. Je ne crois qu'au plaisir, qu'au désir. Enfin, ça veut pas dire que je l'applique (ça serait trop simple !), mais je sais que tout dans la Vie ne fonctionne qu'au désir/plaisir.
Effort contre-productif pour bien parler, oui, quand on fait un effort pour parler, mais il faut quand même bien porter son effort sur quelque chose (au début), sur des techniques de fluence, pourquoi pas ? en les laissant devenir automatiques d'elles-mêmes, mais moi ça ne m'a jamais intéressé, j'ai toujours préféré la technique du "faire semblant" (comme je l'ai déjà dit l'année dernière). Parce qu'en faisant son possible pour surtout ne pas penser à un cheval blanc, on aura l'esprit saturé de ce cheval blanc, parce qu'en faisant tant et tant d'effort pour ne plus faire d'efforts (!), on est évidemment dans l'effort, il faut juste ne plus y penser du tout, se réveiller vierge, aujourd'hui est un nouveau jour et je suis une nouvelle personne, aujourd'hui débute réellement ma vie.
Parce que l'esprit humain est tel une cassette vierge qu'on ne peut pas effacer sans réenregistrer par dessus, il faut se transformer en autre chose. Choisir quelqu'un qu'on aime bien (célébrité, un proche...) quelqu'un qui possède une qualité qui nous fait défaut (une bonne élocution par exemple ! mais pas forcément, un simple charisme fera l'affaire) et se mettre alors à l'imiter. Au début, ça sera un effort (mais pas une corvée), puis, progressivement, ça deviendra un automatisme.
Et puis pensez à viser les graves, vous remarquerez que toutes les personnes qui bégaient ont une voix beaucoup trop haute.
Alors goodbye bégaiement, mais surtout "Hello fluidité !"
Charlie.
Je n'ai jamais remarqué que les personnes bègues avaient la voix trop haute. Parmi toutes celles que j'ai côtoyées et que je côtoie encore (ce qui nous amène à plusieurs dizaines), il ne m'en vient à l'esprit qu'une seule (!) qui a une voix un peu aiguë. Je pense, Charlie, que tu veux plutôt évoquer, chez certaines personnes (pas toutes loin de là), la tendance du larynx à "remonter" sous l'effet de la tension lors d'un blocage, qui a donc pour effet une élévation de la voix dans les aigus.
Oui... C'est vrai que je n'ai pas rencontré tellement de bègues, dans ma vie (beaucoup moins que toi), je suppose que cette recherche des graves vient plus d'une forte conviction personnelle. Quand j'avais 15 ans, j'ai eu un gros coup de froid qui m'a laissé... pas enroué, mais avec une voix très grave, et là, ô miracle ! ma parole sortait toute seule ! Ça a duré le temps de l' "enrouement", mais ça m'a laissé convaincu qu'une voix grave était la solution. Et puis à chaque fois que j'écoutais Jacques Lanzmann, à la radio, sa voix trop haute me frappait comme une évidence, c'était plus ça qui me faisait mal pour lui que son bégaiement. Je lui disais "les graves, Jacques, les graves !", mais il m'entendait pas. Etonnant, non ?!
Charlie.
Charlie, je partage ton sentiment sur la recherche des graves. Cela permet de mettre davantage son corps en résonance. Un exercice très simple pour le démontrer : faites un son très aigu et descendez lentement vers un son plus profond. Vous sentirez votre gorge résonner depuis votre gorge vers votre diaphragme. C'est là que sont les basses. Cela permet de mieux projeter sa voix et donc de moins forcer. J'avais lu quelque part qu'il fallait trouver sa note centrale pour parler avec le moins d'effort possible. J'avais prévu de faire un post là-dessus. Charlie, je tiens peut-être grâce à toi le sujet de mon prochain article :-)
@Daniel : j'éprouve aussi ce sentiment de fleuve quand je suis dans un état de fluidité non contrôlée. La parole coule facilement, naturellement et cela s'accompagne d'une sensation de bien-être.
Je t'avoue, Laurent, que j'avais même envisagé de me mettre à fumer comme un pompier et à boire tout le whisky qu'il faudrait pour me "faire" la gorge, mais j'ai toujours été dégoûté par la fumée, je n'ai jamais fumé une cigarette de ma vie (j'en ai crapotée une demie, adolescent, ça m'a rendu malade, j'ai arrêté !), et l'alcool ne m'a jamais réellement intéressé.
Content de t'avoir donné une idée d'article !
Charlie.
J'ai appris avec consternation le décès de Ruth Mead. Étant moi même bègue, j'ai un profond respect pour elle et ses travaux sur le bégaiement
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