Lorsque vous bégayez, vous savez que certaines lettres ou syllabes ne sont pas vos amies.
Vous avez l’impression d’être dans un jeu vidéo où des aliens vindicatifs surgissent sur votre chemin de parole. Vous choisissez de les combattre ou de les éviter et cela freine votre progression tout en pompant votre énergie.
Certains redoutent les « P » ou les « K », d’autres les « N »… Pour moi, cela a longtemps été la lettre "A", ce qui explique pourquoi, lorsque la mère m'envoyait chercher de l'"Ajax", je revenais avec... du "Mir".
Pour Jane, c’est le « S » :
« Je me bats sur les mots qui commencent par « s » comme succès, sérieux, souvent… En y pensant, je réalise maintenant que ces mots me mettent particulièrement mal à l’aise parce si vous bégayez sur le son « s », vous produisez un sifflement et je trouve ça très embarrassant. Et comme j’essaie d’éviter cette gêne, je me retiens de sortir ce son. C’est la même chose avec les mots comme « financièrement » : j’ai peur que si je reste bloqué sur le «f », le son répété et prolongé va finir par exploser. Est-ce que quelqu’un rencontre le même problème et pour ceux qui l’ont surmonté, comment gérer vous ce genre de mots ? »
Et bien Jane, moi Laurent donner réponses à toi. Le temps de trouver une liane, un slip léopard pas trop moulant et YOOOOOHHHHOHHOHIIIIIHOOOO, c’est parti !!! En route pour de nouvelles aventures au pays de la fluidité !
1. Les techniques de fluence :
Une orthophoniste habituée à travailler avec des personnes qui bégaient (vous avez vu, je n’ai pas dit « spécialisée »…) pourra vous les enseigner. Il y a tout un attirail dans lequel vous pouvez puiser.
La méthode ERASM (voir article ici)
Le bégaiement lent ou relax (voir article ici)
La post-correction des blocages (voir article ici)
Et bien d’autres comme le démarrage en douceur, le bégaiement inverse…
Pour comprendre l’intérêt de ces techniques, imaginons que l’effroyable lettre K soit un énorme chien dressé sur votre route.
Je vous laisse choisir le chien : un pitbull ou un teckel, chacun ses peurs et ses fantasmes, je ne jugerai personne. Vous pouvez même prendre un autre animal, un tigre par exemple. Vous le voyez ? Bien féroce, bien baveur, bien impressionnant.
Habituellement, lorsque vous l’apercevez, même de loin, vos poils se dressent, votre sang se fige et votre sueur se glace. Vous recourez alors à quatre stratégies.
La première est de tourner les talons et de battre en retraite (évitement de parole).
La deuxième est de bifurquer pour prendre un autre chemin uniquement fréquenté par de gentilles lettres à tête de peluche (substitution de mots).
La troisième est de prendre votre élan et de courir très vite en comptant sur la vitesse acquise pour passer sans que le pitbull n’ait le temps de vous choper les fesses.
La quatrième consiste à bander vos muscles et à foncer sur la Bête pour lui taper sur la tête (forçage).
Aucune de ces stratégies n’est hélas efficace pour dompter durablement la bête et, selon l’option choisie, vous y laissez soit de l’énergie, soit de la confiance en vous.
Avec les techniques listées ci-dessus, vous allez progressivement apprivoiser le pitbull en apprenant à l’approcher tranquillement et sereinement, en toute décontraction. Vous allez même réussir à lui caresser la tête et à poursuivre votre chemin en sifflotant. Et ce pitbull deviendra votre ami, un gentil toutou qui vous laissera toujours passer et dont vous apprécierez la douceur de la fourrure.
Je vous laisse choisir le chien : un pitbull ou un teckel, chacun ses peurs et ses fantasmes, je ne jugerai personne. Vous pouvez même prendre un autre animal, un tigre par exemple. Vous le voyez ? Bien féroce, bien baveur, bien impressionnant.
Habituellement, lorsque vous l’apercevez, même de loin, vos poils se dressent, votre sang se fige et votre sueur se glace. Vous recourez alors à quatre stratégies.
La première est de tourner les talons et de battre en retraite (évitement de parole).
La deuxième est de bifurquer pour prendre un autre chemin uniquement fréquenté par de gentilles lettres à tête de peluche (substitution de mots).
La troisième est de prendre votre élan et de courir très vite en comptant sur la vitesse acquise pour passer sans que le pitbull n’ait le temps de vous choper les fesses.
La quatrième consiste à bander vos muscles et à foncer sur la Bête pour lui taper sur la tête (forçage).
Aucune de ces stratégies n’est hélas efficace pour dompter durablement la bête et, selon l’option choisie, vous y laissez soit de l’énergie, soit de la confiance en vous.
Avec les techniques listées ci-dessus, vous allez progressivement apprivoiser le pitbull en apprenant à l’approcher tranquillement et sereinement, en toute décontraction. Vous allez même réussir à lui caresser la tête et à poursuivre votre chemin en sifflotant. Et ce pitbull deviendra votre ami, un gentil toutou qui vous laissera toujours passer et dont vous apprécierez la douceur de la fourrure.
2. Le bégaiement volontaire :
Le bégaiement volontaire, parfois appelé faux ou pseudo bégaiement consiste à bloquer volontairement sur la première syllabe d’un mot ou de la répéter. Par exemple, vous allez commencer une conversation en sachant que vous allez pertinemment bégayer volontairement sur le premier mot.
De nombreuses personnes témoignent que cette technique surprenante leur a été d’une grande aide, notamment pour dézinguer les aliens en forme de p, de k, de s toute autre lettre maléfique … J. David Williams résume ici pourquoi :
« Plutôt que de laisser libre cours à la panique, à la tension et au comportement de lutte, je faisais volontairement ce que j’avais l’habitude de tenter désespérément d’éviter. Et vous savez quoi ? Ça fonctionnait vraiment. Cette technique réduisait ma peur du bégaiement et je ressentais un délicieux sentiment de liberté et de contrôle. Il s’agit d’une très vieille idée : si vous êtes terrifié à l’idée de faire quelque chose, votre peur diminuera à proportion de votre capacité à faire délibérément une partie de cette action. Le bégaiement est un comportement amplifié par vos efforts pour l’éviter. Plus j’évitais cette tension incontrôlable en insérant, occasionnellement, des disfluences volontaires (répétitions ou prolongations de sons), moins je bégayais. Il faut de la pratique pour en venir à accepter cette idée. »
Si vous souhaitez en savoir plus, vous pouvez lire les 3 articles que j’ai déjà écrit sur le sujet :
3. Le travail de sape ou pilonnage
Cette stratégie est la plus simple et sans doute la plus efficace, surtout si vous avez dans votre musette une des techniques d’élimination des blocages évoquées plus haut. L’objectif est de vous confronter au son redouté, encore et encore, jusqu’à ce qu’il perde toute connotation négative A force de passer dessus, vous allez aplanir la bosse, poncer l’excroissance sur laquelle vous accrochiez.
Si on revient au bégaiement volontaire, voici ce que raconte Lon L. Emerick dans « Conseils pour ceux qui bégaient » :
« … Plus vous bégayerez volontairement, moins vous vous retiendrez ; et moins vous vous retiendrez, moins vous bégayerez. Nous avons travaillé avec une jeune étudiante qui a pratiquement cessé de bégayer en une semaine grâce à cet exercice. Comme nous étions très pris par les examens de doctorat, nous lui avons donné un compteur manuel en lui disant : « 100,000 personnes vivent à Lansing ; vois à combien tu peux parler tout en exhibant ton bégaiement. » Lorsque je l’ai revue sept jours plus tard, elle était complètement exténuée mais arborait un large sourire et ne bégayait pas. Nous ayant pris au mot, elle avait travaillé sans interruption. Aussi incroyable que cela puisse être, elle s’était confrontée à 947 interlocuteurs ! Et elle était maintenant incapable de bégayer involontairement. »
Andrew a également suivi ce conseil pour mettre en pratique sa technique de fluence :
« Il y a 8 ans quand je commençais à devenir fluent et à vaincre mon bégaiement, c’est le S qui me posait le plus de problèmes.
Une fois que j’ai eu trouvé ma technique, je me suis astreint à la pratiquer, sans tenir compte de la peur que je pouvais ressentir.
Par exemple, la célèbre chaîne Wetzel's Pretzels (Ndt : une sorte de Mac Do du Bretzel aux Etats-Unis) propose le "sinful cinnamon pretzel (NdT : bretzel à la cannelle)" (double son S). A l’époque où je bégayais, j’aurais pointé l’article du doigt en disant : « je veux un de ces, euh… » Mais je me suis forcé à utiliser mes techniques et à passer commande en désignant les choses par leur nom.
Les premières fois, j’ai « échoué » misérablement. Je suis allé à un Wetzel's Pretzels bondé avec de longues files d’attente et j’ai fait la queue, le cœur battant à 100 à l’heure avant et au moment de passer commande…
Certains soirs, je me retrouvais avec un cornet de bretzels sans aucune envie de les manger et sans histoire de fluence à raconter. Mais j’ai continué à y aller. J’ai continué malgré ma peur et la vilaine voix qui me disait que je ne pouvais pas le faire et que ma technique de fluence ne marchait pas. Mais à chaque fois, mon épouse a été là pour écouter et me signaler les erreurs flagrantes que me faisait commettre la peur. Elle m’a montré combien celle-ci pouvait m’amener à saboter purement et simplement ma technique… Pourtant, je savais que si je l’appliquais correctement, comme lorsque je ne paniquais pas, cela rendrait le bégaiement impossible. Alors un jour, ça a fonctionné. Il y a eu un déclic… J’étais dans la file et j’ai commandé PARFAITEMENT un « sinful cinnamon pretzel » et j’étais si heureux que je l’ai répété encore et encore au serveur et que j’ai refait la queue plusieurs fois pour commander parfaitement d’autres « cinnammon pretzels » !
Quelques jours après, je suis allé à la réunion de mon club Toastmasters (NdT : club pour s’exercer à la prise de parole en public) et il y avait un exercice où il fallait raconter un classique des contes de fées. J’ai volontairement choisi CENDRILLON à cause de ce fameux son « S » et j’ai fait en sorte que son nom revienne sans cesse au cours de mon récit. Au début, j’étais TRES nerveux mais j’avais désormais un point de repère et j’avais déjà commencé à reprogrammer mon subconscient grâce à la victoire du Bretzel. J’ai raconté mon conte de manière impeccable.
Par la suite, je me suis fixé plein d’autres challenges en « S » jusqu’à ce problème appartienne définitivement au passé. Et je savais AU PLUS PROFOND DE MOI que c’était moi et seulement moi qui choisissais quels sons étaient « difficiles ». Ce qui signifie que c’est aussi moi qui choisis ceux qui sont « faciles » ! J’avais donc le pouvoir de rendre facile n’importe quel son ou situation. Ainsi, j’ai été fluent à 99.8% au cours des 8 dernières années. »
Certains soirs, je me retrouvais avec un cornet de bretzels sans aucune envie de les manger et sans histoire de fluence à raconter. Mais j’ai continué à y aller. J’ai continué malgré ma peur et la vilaine voix qui me disait que je ne pouvais pas le faire et que ma technique de fluence ne marchait pas. Mais à chaque fois, mon épouse a été là pour écouter et me signaler les erreurs flagrantes que me faisait commettre la peur. Elle m’a montré combien celle-ci pouvait m’amener à saboter purement et simplement ma technique… Pourtant, je savais que si je l’appliquais correctement, comme lorsque je ne paniquais pas, cela rendrait le bégaiement impossible. Alors un jour, ça a fonctionné. Il y a eu un déclic… J’étais dans la file et j’ai commandé PARFAITEMENT un « sinful cinnamon pretzel » et j’étais si heureux que je l’ai répété encore et encore au serveur et que j’ai refait la queue plusieurs fois pour commander parfaitement d’autres « cinnammon pretzels » !
Quelques jours après, je suis allé à la réunion de mon club Toastmasters (NdT : club pour s’exercer à la prise de parole en public) et il y avait un exercice où il fallait raconter un classique des contes de fées. J’ai volontairement choisi CENDRILLON à cause de ce fameux son « S » et j’ai fait en sorte que son nom revienne sans cesse au cours de mon récit. Au début, j’étais TRES nerveux mais j’avais désormais un point de repère et j’avais déjà commencé à reprogrammer mon subconscient grâce à la victoire du Bretzel. J’ai raconté mon conte de manière impeccable.
Par la suite, je me suis fixé plein d’autres challenges en « S » jusqu’à ce problème appartienne définitivement au passé. Et je savais AU PLUS PROFOND DE MOI que c’était moi et seulement moi qui choisissais quels sons étaient « difficiles ». Ce qui signifie que c’est aussi moi qui choisis ceux qui sont « faciles » ! J’avais donc le pouvoir de rendre facile n’importe quel son ou situation. Ainsi, j’ai été fluent à 99.8% au cours des 8 dernières années. »
Le témoignage de Dave McGuire est aussi intéressant. Dave est un américain qui a créé un programme de rééducation du bégaiement.
Il est lui aussi une personne qui bégaie et j'ai trouvé une histoire
intéressante le concernant sur le même forum où j’ai lu l’histoire
d’Andrew
(http://groups.yahoo.com/neo/groups/neurosemanticsofstuttering/info).
« L’histoire épatante d’Andrew me rappelle une conversation que j’ai eue avec Dave McGuire voici quelques années. Dave me racontait comment il avait soudainement commencé à craindre les mots commençant par un certain son.
Pour un type qui proposait l’un des programmes les plus efficaces contre le bégaiement, cela aurait pu être très embarrassant, en particulier s’il commençait à éviter des mots.
"Alors qu’as-tu fait, Dave ?" lui ai-je demandé.
Et Dave m’a répondu : « Je l’ai tué. Simplement tué. J’ai passé la journée entière dans la rue à demander tout ce qui me passait par la tête et commençait par cette lettre. J’ai dû le faire plus de 150 fois. A la fin de la journée, la peur avait disparu. »
"Alors qu’as-tu fait, Dave ?" lui ai-je demandé.
Et Dave m’a répondu : « Je l’ai tué. Simplement tué. J’ai passé la journée entière dans la rue à demander tout ce qui me passait par la tête et commençait par cette lettre. J’ai dû le faire plus de 150 fois. A la fin de la journée, la peur avait disparu. »
Bien sûr, ça ne fonctionne peut-être pas pour tout le monde mais une chose est sûre : personne ne pourra dire que ça ne marche pas avant de l’avoir testé 150 fois…
Il n’y a pas de meilleur moyen de vaincre une peur, quelle qu’elle soit, que de l’affronter. Et ces derniers témoignages me renvoient à une question que je me pose maintenant lorsque une chose me déplaît ou me pose souci dans ma vie :
« Est-ce que je suis dans l’action ? »
C'est-à-dire, une fois le constat établi et le problème identifié, qu'ai-je mis en oeuvre pour que les choses changent ?
« Est-ce que je suis dans l’action ? »
C'est-à-dire, une fois le constat établi et le problème identifié, qu'ai-je mis en oeuvre pour que les choses changent ?
Rechercher une orthophoniste, c’est être dans l’action. Parler de son bégaiement à un proche, c’est être dans l’action. Refuser d’éviter un mot, c’est être dans l’action. Décrocher son téléphone pour passer des appels, c’est être dans l’action… Et laisser un commentaire sur un blog, c’est être dans l’action :-)
Je ne sais plus si c’est Gandhi ou Donald Duck qui a dit « Si vous voulez changer quelque chose dans votre vie, vous allez devoir faire une chose que vous n’avez jamais faite." Une évidence ? Sans doute. Alors pourquoi attendre ?
Et souvenez-vous : dans un an, vous serez heureux d’avoir commencé aujourd’hui.
Bonne journée, bonne semaine et bonne Journée Mondiale du Bégaiement.
Laurent
Cet article soulève deux problématiques différentes :
RépondreSupprimer- la "croyance " que l'on bégaye sur des lettres ou des mots : je vais m'expliquer.
- la peur et ses ravages (qui est ici liée à l'image que l'on a ou que l'on aimerait que l'autre ait de nous-mêmes)
On ne bégaye pas sur des lettres tout simplement parce que l'on ne parle pas avec des lettres, mais avec des sons ou phonèmes qui sont la trace sonore des gestes articulatoires. La parole n'est pas régie par les mêmes lois que la langue écrite. Dans le bégaiement c'est un geste articulatoire qui coince, produit avec un surcroit de force et de tonicité qui parait incontrôlable.
La parole produit des groupes de "mots" organisés autour d'un noyau de sens. Ces groupes sont séparés par des mini silences, les pauses actives (qui donneront la ponctuation à l'écrit). Cette séparation par les pauses silencieuses, qui sont de l'ordre de 400msec, est appelée le "chunking".
Quand quelqu'un dit "je bégaye sur tous les mots" ou "je ne peux pas prononcer de mot sans bégayer", il se trompe de découpage. Par exemple, si je veux dire "il n'y en a pas", je vais le dire "en un seul mot" et non pas en six séparés. On bégaye toujours moins en quantité qu'on ne le croit - mais cela n'est pas nier le bégaiement. On bégaye dans la majorité des occurrences en début de chunk.
Il ne faut donc pas confondre la parole et le langage écrit qui ne se découpent pas de la même manière. Malheureusement l'école n'apprend qu'à lire et écrire et non à parler, et la phonétique est à peine approchée que dans l'enseignement des langues étrangères.
Il y aurait encore plus à dire la dessus. j'y travaille !
- la peur et l'angoisse d'anticipation. "bégayer, c'est ce qui se passe quand on a peur de bégayer" disait Wendell Johnson, grand bégologue des années 30 et lui-même bègue.
La peur sert à nous préserver des dangers, encore faut il que ceux ci soient réels. On aurait plutôt peur d'être vu et entendu comme bégayant, car cela constitue une atteinte à l'image idéalisée de soi, une blessure narcissique.
Or on parle...pour s'exprimer dans la communication inter personnelle. l'autre est là non pour juger (si! si!) mais pour savoir si vous voulez un café long ou court, serré ou pas, avec ou sans sucre...
Malheureusement cette angoisse d'anticipation peut devenir disproportionnée et aide à dégrader encore plus l'image de soi.
Que faire ?
Travailler sur ces deux aspects.
Les techniques d'attaque douce sont toutes efficaces, encore faut-il s'y entrainer (avec retour à l'oreille, s'il vous plait- c'est comme cela que se font les apprentissages moteurs!).
- travailler sur la peur et les angoisses d'anticipation, soit par un travail global (merci les TCC) soit par un travail local sur la maitrise des tensions musculaires.
La technique du bégayage inverse me parait particulièrement adéquate car elle combine ces deux approches en faisant travailler sur la perceptions des tensions articulatoires en s'enregistrant ou se filmant. Se produit alors une désensibilisation du simple fait que l'on manipule le symptôme au lieu d'en avoir peur.
Hugo Gregory distinguait deux sortes de bégayages : les "coeurs" de bégayage (core stuttering) et les bégayages d'anticipation, trace de ce que l'on fait pour éviter de bégayer sur le phonème redouté..mais qui est hélas perçu comme du bégayage. En supprimant ces bégayages d'anticipation, on supprime presque les deux tiers des occurrences de bégayages. Comme quoi la peur aggrave les choses.
Mais on ne maitrise pas la peur comme on maitrise le déroulement du mouvement.
M-C Monfrais-Pfauwadel
Merci beaucoup Docteur pour ces explications et informations. Les techniques de fluence peuvent être rassurantes pour affronter la peur. Connaître les manoeuvres de secours permet de faire le grand (ou petit) saut. Et ces techniques doivent par ailleurs être mises à l'épreuve en situation réelle.
RépondreSupprimerQu'entendez-vous par retour à l'oreille ? Ca a l'air intéressant :-)
Laurent
Bonjour et merci pour ce très bonne article, cela permet de continuer d'apprendre ou de complété les technique avec l'orthophoniste (ou se remémorait). J'aurait une petite question : si on pratique le bégaiement volontaire en lisant un texte a voix haute et de se corriger de soit même en pratiquant la prolongation du son, cela permet il de mieux contrôler son bégaiement? Cédric
RépondreSupprimerBonjour Cédric et merci pour ton message. Il faudrait que tu en parles avec ton orthophoniste mais je pense que cela peut en effet être un bon début pour s'exercer. De manière générale, quelle que soit la technique, il faut s'exercer progressivement en commençant par des situations peu stressantes (donc seul). Le bégaiement volontaire pourra te permettre de prendre conscience de tes tensions et de voir comment tu arrives à les dissoudre grâce à la prolongation. L'autre avantage du bégaiement volontaire est d'oser bégayer ouvertement pour dissiper l'appréhension qu'on a de bégayer. Et ça tu ne pourras le faire que face à un interlocuteur. Bon entraînement ! Laurent
RépondreSupprimerPour répondre, même un peu tard à vos questions, Laurent et Cedric :
RépondreSupprimer- le retour à l'oreille, ce n'est pas de se balader avec une oreillette comme un présentateur télé..;ce serait trop perturbant et surtout pas naturel.
C'est en entendant parler qu'on apprend à parler. Mais on ne peut pas faire les deux en même temps. Comme en apprentissage de langue étrangère ou en apprentissage du chant, il s'agit de beaucoup s'enregistrer..et beaucoup se réécouter, mais par courtes prises de 1mn à 2mn - au delà on passe dans une autre sorte de mémoire et surtout cela devient vite très ennuyeux.
On apprend ainsi à corriger le "geste" de la parole, en se basant sur les sensations perçues. Si j'entends que ce que j'ai dit était fluide, alors j'apprends à repérer cheque "parler fluide" me procure comme sensations, vibratiles ou kinesthésiques...et si je retrouve la sensation, je retrouve nécessairement la production sonore. C'est d'ailleurs excellent de s'entrainer les yeux fermés..;c'est ainsi que l'on voit le mieux dans son corps.
c'est ainsi que l'on apprends le mieux à chanter juste, en entrainant encore et encore la boucle sensori-motrice. Rosenfeld prétend jusqu'à 600 fois d'affilée correctement. Cela ne passe pas par le langage, donc pas par les mêmes aires cérébrales.
C'est aussi comme cela que l'on "corrige" un accent, etc...
S'entrainer au magnétophone, avec une glace, les yeux fermés..tout ce qui va renforcer les retours sensoriels.
La parole n'est pas désincarnée - elle est même bien ancrée dans la chair - et ses "rétrocontrôles" mobilisent toutes sortes de perceptions sensorielles, sauf la vue puisqu'on a les yeux au dessus de la bouche.
Posez vous la question, cherchez en vous même : qu'est ce qui dans mes sensations corporelles me permet de distinguer ce que je produis de fluide de ce que je produis de disfluent ?
- pour ce qui est du bégayage volontaire, je ne peux qu'encourager à s'y entrainer, tout en étant conscient des limites de l'exercice. C'est effectivement le meilleur exercice connu pour étalonner son sensorimètre personnel. Il est bon, quand on s'y entraine de faire varier les degrés de tensions...en s'enregistrant. A l'écoute, ensuite, on apprend à discriminer les disfluences non bègues que produit le tout un chacun et les disfleunces plus bègues. On apprend aussi à se mettre à la place de l'autre et à essayer de disciriminer ce qui est vraiment gênant pour la communication, pour la circulation su sens - de ce qui est juste de l'atteinte narcissique- même si ça fait bobo.;
Une étape ultérieure que j'ai introduite est de s'exercer à faire suivre les bégayages les plus genants par une auto-corrections simple, juste sur le mot abîmé, sans commentaire, comme un non bègue, mais avec un tout petit temps de latence d'une à deux secondes qui n'est jamais perçue, histoire de se détendre et de repartir d'un bon pied, ou d'une bonne bouche.
Plus on s'y entraine, plus on y pense.
Mais cela ne sera jamais automatique - car l'apprentissage des 600 fois serait à faire pour chaque disfluence.
Comme Per Alm l'a bien montré, la régulation de la parole se fait au niveau des noyaux gris centraux qui régissent les tâches de fond subconscientes. les tâches conscientes et les taches d'apprentissage exigent une remontée à la conscience, c'est à dire au cortex cérébral, et cela demande un neurone de plus- donc un minime temps de latence irréductible.
Si en plus on désamorce la peur et on accroit l'estime et la confiance en soi....on est les rois du monde.
Mais ça prend du temps, du courage, de la lucidité, de l'exigence. C'est pourquoi il est interessant de se faire aider.
Marie-Claude Monfrais-Pfauwadel
Merci beaucoup Docteur pour cet éclairage. Cette approche sensorielle, voire sensuelle :-), du begaiement est trés séduisante. Je pense vraiment que cela doit contribuer à la levée des tensions et à la découverte du plaisir dans l'acte de parole. Voilà une nouvelle piste à creuser !
RépondreSupprimerpetite erreur perçue à la relecture :
RépondreSupprimerplus on s'y entraine, moins on y pense
Mon approche est juste sensorielle.
Plaise qu'elle devienne sensuelle, car parler fluide est un grand bonheur...
mais "Quelle belle harmonie quand le dire et le faire vont ensemble" (Montaigne).
la parole est acte et construction, elle est outil....aussi !
MC M-P
Bonjour Marie-Claude Monfrais-Pfauwadel Quand vous dite s'enregistrer je suppose que ces soit en téléphonant ou en parlant a quelqu'un avec un micro dissimuler pour pouvoir se mettre en "situation" de bégaiement?
RépondreSupprimerEt si l'on on s'entraîne 600 fois sur le mot ou phrase incriminer ces a la maison seul?
Merci d'avance pour votre future réponse
Moi c'est les "r", les "g"; les "k", les "p".. je bloque sur chaque phrase..😭 c'est nul je bloque et je passe pour une grosse nul
RépondreSupprimerBen non, t'es pas une grosse nulle ! Ce n'est pas de ta faute si tu bégayes. Tu peux essayer les techniques présentées dans l'article et choisir celle qui te convient le mieux. Tu peux t'exercer seule ou avec une orthophoniste. Bonne recherche !
RépondreSupprimer